HerzAtmungen cs833

 

 

 

 

 

 

 

 

Olaf Rupp est un guitariste volatile dont il faut écouter plusieurs albums pour commencer à cerner l’étendue et la pertinence de son travail avec la six cordes acoustique ou électrique à laquelle il joint une remarquable palette d’effets électroniques. Mais aussi les cinq doigts de la main gauche et surtout les cinq doigts de la main droite. Que ce soit en solo, avec Tristan Honsinger, Lol Coxhill, Shoji Hano, Tony Buck, Joe Williamson, Rudi Mahall, Ulrike Brand, Rudi Fischlehner, Paul Rogers et Frank Paul Schubert, Olaf Rupp est un étonnant musicien. Quoi de plus naturel pour lui de découvrir un nouvel horizon avec cet obstiné pluri-instrumentiste chercheur qu’est Udo Schindler, lequel a enregistré avec une kyrielle d’improvisateurs de tous bords dont Jaap Blonk, Peter Jacquemyn, Damon Smith, Irene Kepl, Erhard Hirt, Wilbert De Joode, Xu Feng Xia, Nikolaus Neuser, Andreas Willers, Meinrad Kneer, Eric Zwang Eriksson…, et, bien sûr, les duos de clarinette basse avec Ove Volquartz . 
Dans ces HerzAtmungen enregistrés à Munich en juin de l’année dernière , on l’entend au cornet, à la clarinette basse, au sax alto et au tuba avec un amour pour le son, les glissandi curieux, la pâte sonore, le mystère. Tous deux construisent patiemment et spontanément des événements sonores auxquels notre écoute imaginative et notre imaginaire se joignent aux leurs pour voyager, rêver, ressentir, se libérer de nos idées toutes faites. Les effets de durée et de résonnance de la guitare amplifiée , de ses harmoniques se mêlent au scintillement de la colonne d’air pressée à l’embouchure par les sifflements et sussurements  d’Udo. Les gargouillis de la clarinette basse, ses grasseyements trouvent un écho dans les oscillations et tremblements électriques. La photo de pochette nous montre Olaf à l’archet sur les cordes de sa fender et Udo engagé dans un growl vibrant dans le pavillon de sa clarinette basse. Leur mise en commun de tous ces éléments sonores voisins, miroités ou contrastés crée un univers sonore unique, onirique, suspendu dans l’espace du silence, à la fois mouvant et statique. Tous deux sont immergés dans la marge de leurs  instruments, au-delà des limites d’un jeu « normal » Leur approche a toute la sensibilité du meilleur jazz sans que les formes ne relèvent d’aucune musique formelle ou programmée. Sauf peut-être le phrasé du sax alto en 4/ où Olaf Rupp alterne deux approches, une en cascade qui coïncident  avec l’articulation du sax et une autre qui détonne à ravir. Le sixième morceau nous fait entendre notre audacieux au tuba face aux cascades d’accords en sourdine  et les harmoniques mystérieuses de Rupp. 
J’avais déjà bien apprécié le travail de Schindler avec le guitariste Gunnar Geisse et le clarinettiste Ove Volquartz. Cela se confirme ici avec un autre guitariste, Olaf Rupp qui le transporte aux confins de l’imaginaire. Un magnifique dialogue inattendu entre deux improvisateurs chevronnés…  Jean-Michel Van Schouwburg (Orynx)